e Monde a consacré au livre que je viens de publier - avec la collaboration de Dominique de Montvalon - une page
entière. A priori, quel hommage, presque démesuré ! Hélas, cette page - tout entière consacrée à relever, à la façon d'un scribe intégriste, de supposées erreurs dans l'appareil de références et
de citations - ne dit pas un mot de notre analyse de fond au lendemain de l'échec totalement prévisible et extrêmement grave du sommet de Copenhague. Pourtant, quand le doigt montre la lune,
c'est la lune, on le sait, qu'il faut regarder. Mon livre dérangerait-il trop de conformismes, trop d'intérêts ?
La vérité est la suivante : dans un nombre considérable de pays, et pas seulement dans les pays anglo-saxons, ce
débat - inévitable parce que vital - est déjà engagé. Il est urgent donc qu'il s'engage en France, et sur la place publique, n'en déplaise à ceux qui tentent de continuer à en faire, au service
de leurs thèses, un monopole privé et verrouillé.
Cinq questions, au moins, se posent.
1. Le fonctionnement du GIEC pose-t-il problème ? Notre réponse : oui, très gravement. Non seulement parce que chaque
jour apporte la preuve d'erreurs scientifiques graves commises par cet organisme, mais aussi parce que son principe de fonctionnement - celui du consensus, qui passe sous silence les opinions
minoritaires - est incompatible avec l'éthique de la science. Aucun scientifique ne peut accepter une vérité décidée par quelques-uns et tombée d'en haut.
2. La planète est-elle menacée de réchauffement ? Oui, de deux ou trois degrés dans... un siècle. Mais elle est aussi,
peut-être, menacée de refroidissement. Faut-il continuer à s'agiter dans des colloques sans rien faire ou faut-il, comme nous le suggérons, s'adapter à toutes les éventualités ?
3. Le CO2 est-il une menace ? L'excès de CO2, évidemment. Et cet excès doit être combattu car,
par exemple, il acidifie l'océan et, de toute manière, il est de bonne pratique d'économiser les énergies fossiles. Mais, en l'état, tout lui imputer - donc tout imputer à l'homme -, c'est
s'égarer.
4. Y a-t-il une idéologie du réchauffement climatique ? C'est une évidence. Il faut retrouver les lois élémentaires du
débat scientifique - ouvert, contradictoire, sans a priori -, mais certains écologistes (ou se présentant comme tels) s'arc-boutent : hors de notre pré carré, disent-ils, point de salut. De
quoi ont-ils peur ?
5. Comment expliquer la rébellion, à Copenhague, des grands pays émergents (Chine et Inde en tête) ? Par leur refus
d'un néocolonialisme rampant, adossé à de grands intérêts financiers dont l'un des principaux porte-parole est l'ex vice-président américain Al Gore. Un écobusiness qui a aussi ses pratiquants
en France.
Discutons de tout cela, qui n'est pas mince. Et voyons si le dossier climatique est ou non, pour une planète minée ici
par une crise historique et le chômage, là par la famine et le manque d'eau potable, la priorité des priorités. Je dis que non. Il faut croire au progrès et en l'avenir, et l'avenir, c'est la
croissance verte et l'innovation. Mais l'avenir ne se bâtira ni en circuit fermé ni avec des oeillères, encore moins en propageant la peur. En ce sens, Copenhague n'est pas un simple dérapage,
mais un signal d'alarme. Il faut repartir de zéro, ou presque. C'est ce à quoi invite, entre autres, mon livre."
Voilà un ton nettement moins polémique que celui auquel CA nous avait habitués. Et les questions qu'il pose, ne faudrait-il pas en discuter ?
Mais reprenons quelques-une des attaques de Foucart contre le livre.
- CA - brouillon comme souvent - se trompe sur les initiales du GIEC, c'est vrai, ce dernier devant plutôt se nommer GEIC, mais l'important est dans Intergouvernemental et non
International. Ce groupe d'experts est en effet une émanation intergouvernementale, c'est-à-dire dépendant étroitement de ces gouvernements, qui sont très interventionnistes dans la
rédaction des rapports de consensus.
- Une phrase comme "les émissions humaines (...) en soient certainement la cause principale" ( "Although increased human-induced emissions of long-lived greenhouse gases are certainly the
main driving factor") est absurde, même le GIEC n'ose pas l'écrire. Cette phrase fait évidemment partie du résumé de l'article et n'est pas représentative de son contenu, qui analyse les
origines et les effets de la pollution (notamment aérosols, ozone et carbone noir). Dire comme CA que le CO2 n'a "rien à voir" avec le réchauffement est, c'est vrai, assez
exagéré... Cela dit, une fraction non négligeable de glaciologues sont étonnés de l'ampleur de ce qu'on appelle l'anomalie du bassin arctique, et hésitent à y voir un effet direct du RC, d'où
un article comme celui-ci, qui cherche à comprendre.
- A propos de l'Antarctique, CA ne parle pas des glissements de glace, mais de réchauffement. Ce glissement est-il dû au RC ? Rien ne permet de le croire. Et je pensais que la montée des
eaux venait de leur réchauffement ?
- Les raisons avancées du nom de "Groenland" sont-elles fausses ? Je n'en sais rien et Foucart non plus, qui prend comme avéré un mythe quasi-millénaire ; comme le dit Jared Diamond dans
Collapse : "some historians think that the name really was coined with deceitful intent by Erik the Red [...] so as to induce other Vikings to join him". Et, plus loin : "I
discovered to my surprise that the name Greenland might have been bestowed honestly, not as false PR". Quoi qu'il en soit, Foucart lui-même ajoute plus loin : "l'écrasante majorité des travaux
de reconstructions paléoclimatiques suggèrent qu'elle était moins chaude que la période actuelle". Suggèrent. Moins chaude. Quelle précision ! Personne n'a jamais nié l'existence d'une période
de réchauffement à l'époque, malgré les tentatives pathétiques de Foucart de vouloir en atténuer l'importance.(*)
- Oui, là on a du CA typique, qui n'a sans doute pas relu son brouillon... ou il y a eu un mastic. Mais Foucart ignore-t-il qu'il s'agit de Kerry Emanuel et non Emmanuel ?
Quand on veut faire le puriste...
- Effectivement, nulle trace de "Sine and collaborators" dans Science... Ah, ce CA !
- Tous les climatologues savent bien que les nuages et le carbone noir sont les sources les plus graves d'imprécisions des modèles de circulation atmosphérique globale ; mais certains
climatologues estiment que de telles imprécisions rendent toute projection illusoire, et la question de savoir pourquoi J-P Chalon n'est pas mieux impliqué dans le GIEC reste parfaitement
recevable, et n'est nullement annulée par la citation du rapport du GIEC. D'ailleurs, qui sera ou ne sera pas dans le WG1 est essentiellement politique, et il y a déjà eu des démissions à grand
fracas.
- Foucart ment lorsqu'il parle des "présentateurs de bulletin météo à la TV" - il s'agit des "Monsieur Météo", qui, aux USA, ne sont nullement des amateurs, vu les intérêts financiers
en jeu. Voici l'adresse de l'article original.
Mais assez avec Foucart, voyons un peu le papier de Fellous.
P.S. Finalement, j'ai lu le livre. Et la première bourde (les initiales du GIEC) est une note en bas de page, due presque certainement aux éditeurs et pas à
Allègre. J'en reparlerai.
(*) Depuis, d'autres reconstructions nettement plus fiables ont effectivement conclu à un
réchauffement médiéval, et pas seulement en Europe.
[à suivre...]