On tourne donc la page Gbagbo, tout au moins provisoirement, car rien n'est encore vraiment réglé. C'est à présent au tour de Ouattara de se sucrer et de garnir son compte en Suisse. Mais au moins on peut espérer un début de résolution au problème des "burkinabés" en Côte d'Ivoire. Ce sera sans doute long... Ce qui m'étonne tout de même un peu, c'est la mâle détermination française à casser du Gbagbo-coup-d'Etat et son silence total sur le petit snotneus de Rajoelina. Il est vrai que les 9 morts de Bouaké en 2004 valent bien plus que les Sukhoi, et le blanc-seing accordé par Bernard Kouchner (ah, celui-là...) à Gbagbo n'avait de valeur que diplomatique.
J'ai donc, Côte d'Ivoire en cause, passé du temps devant la télé ces derniers jours et j'ai donc dû me farcir les inévitables concerts de malinformation autour de Fukushima, à croire que la catastrophe du Japon se résume à ça. Certes, ce n'est pas un incident quelconque et il faudra en tirer les leçons (pour moi, la principale étant de ne pas construire une centrale à côté de la mer dans un pays de tsunami. D'après ce que j'en ai entendu, la centrale pouvait étaler des vagues de 5 m mais manque de chance, elles ont atteint 6.5 m. Rideau. Par contre, l'autre centrale à quelques km de là s'est arrêtée tout à fait régulièrement), mais c'est un tout petit peu crispant de voir se succéder des "experts nucléaires" indépendants et autoproclamés - dont bien sûr les inévitables du CRIIRAD - et jouer les Philippulus. Il y a deux ou trois jours, je voyais un reportage sensationnel de deux journalistes qui avaient bravé les interdictions et s'étaient introduits dans la zone interdite autour de la centrale, bien sûr munis de dosimètres et de compteurs Geiger qui faisaient un bruit glaçant d'effroi (*). On voyait des chats, des chiens, des vaches gambader dans les prairies et dans les rues abandonnées ; ils n'avaient pas été foudroyés, ils avaient l'air de bien se porter, mais évidemment ils ne tarderaient pas à crever dans d'atroces souffrances, comme les centaines de milliers - voire millions - de Japonais contaminés. Lorsqu'ils sont arrivés en vue de ce qui restait de la centrale, un chiffre apparut en incrustation sur l'image : 107 µSv/h (pourquoi un flux, on peut se le demander, mais peu importe). La voix grave et dramatique du commentateur annonça alors que les journalistes décidèrent de rebrousser chemin car - il l'a dit, je le jure ! - à cette dose, trois heures d'exposition correspondaient à une radio des poumons...
Chacun sait qu'une radio des poumons (ou du foie, ou du genou) est, sinon mortelle, du moins extrêmement risquée, et le commentateur devait donc avoir les larmes aux yeux devant tant d'héroïsme. Comme devant celui des liquidateurs, dont j'avais entendu dire par un des experts du CRIIRAD que ce n'étaient pas à eux de se sacrifier, mais aux tenants du nucléaire, qu'on devrait envoyer à leur place... Ce terme de liquidateurs étant d'ailleurs servi à la louche pour faire le lien avec Tchernobyl, lien bien évidemment totalement falsifié.
Je citerai tout de même quelques chiffres sur ces fameux Sieverts (dans ma jeunesses, on parlait de rems) dont se gargarisent les journalistes :
- mammographie : 3 mSv
- CT scan thoracique : 6 à 18 mSv
- dose maximale admise par la Commission internationale sur la Radioprotection pour un "liquidateur" : 500 mSv
- dose maximale admise par la Commission internationale sur la Radioprotection pour un "liquidateur" sauvant des vies humaines : 1000 mSv
On trouvera des chiffres un peu partout, mais j'aime particulièrement ceux de la BBC.
Pour ce qui est du nucléaire en général, je me borne à Jancovici, qui est peut-être la bête noire de certains mais qui est tout de même incollable dans son domaine d'expertise, à savoir l'énergie.
(*) qu'il soit bien entendu que je ne me moque nullement des journalistes ; ils prenaient de vrais risques, au moins le leur avait-on dit.