Je vous ai parlé de mon désir d'enfin terminer le livre de Musil. C'est en cours... Mais je ne peux m'empêcher de livrer au moins deux phrases de ce chef-d'oeuvre :
"[...] quelque chose clochait et les empêcherait toujours d'être corps à corps dans leurs étreintes, quand bien même ils se déferaient de toutes les entraves du vêtement et de la morale." C'est un superbe zeugme, comme cette belle phrase d'une rédaction d'un de mes condisciples d'il y a, oh, bien longtemps : "j'y retrouve mes parents et mes habitudes".
"Il [Walter] émettait toujours de la petite monnaie de sentiment, mais c'était de l'or et de l'argent, alors qu'Ulrich [l'Homme sans qualités] opérait en plus grand, avec des sortes de chèques intellectuels, sur lesquels étaient écrits d'immenses chiffres ; mais ce n'était jamais en fin de compte que du papier." Ce qui me fait penser à Pierre Sterckx estimant que Marcel Duchamp signait (dans son oeuvre) des chèques sans provision pour autant de milliards qu'en voulait le bénéficiaire.
Cela dit, une dizaine de phrases du même genre par page ne facilite pas la lecture, même si cela exalte l'intelligence !